Gustave Flaubert — L'Éducation sentimentale [1869]

Première partie – Chapitre 1 – " Ce fut comme une apparition "

Image du manuscrit - site Gallica (bnf.fr) — Transcription du folio 599_62r

  7.

quel était son nom, sa demeure
son existence
sa vie, son passé, il souhaitait
connaître les meubles de sa
chambre, toutes les robes
qu’elle avait portées, les
gens qu’elle fréquentait
                     de son corps
& le désir de la possession
physique même disparaissait
sous une envie plus profonde
dans une curiosité douloureuse
qui n’avait pas de limites


                                           foulard  l’aborda en
                          coiffée d’un madras & tenant
B.                      tenant
Une négresse qui tenait sur le bras une petite fille déjà gde, arriva
                                        par la main
près d’elle. L’enfant dont les yeux roulaient encore des larmes venait
de s’éveiller,[ Elle la prit sur ses genoux] Mademoiselle n’était pas
sage, quoiqu’elle eût sept ans bientôt, sa mère ne l’aimerait plus. on lui
                                                                          se réjouissait
pardonnait trop ses caprices. - & Frédéric se délectait à entendre ces
choses-là, comme s’il eût fait une découverte, une acquisition.

 

                                                                                     son existaire*
{{ Il aurait voulu connaître son nom, sa demeure, sa vie ordinaire,
son passé, les meubles de sa chambre, toutes les robes qu’elle avait portées
                                                                          son corps
les gens qu’elle fréquentait, & le désir de la possession physique même
disparaissait sous une envie plus profonde dans une curiosité douloureuse
qui n’avait pas de limites. }}  X
Il la supposait d’origine andalouse – créole peut-être. Elle avait
                              sans doute
ramené des îles, sans doute, cette négresse avec elle.
                             sans doute                                                  placé
Cependant [son châle]. Un long châle à bandes violettes était posé
                   son dos
derrière son dos, sur le bordage de cuivre. Elle avait dû bien des fois
à bord, durant les soirs humides, [sur la mer] en envelopper sa taille le prendre
partout avec elle,
s’en couvrir les pieds, dormir dedans. Mais
                                                                peu à peu
entraîné par le poids d/les franges, il glissait, il allait tomber
dans l’eau. Frédéric fit un bond & le rattrapa.
Elle lui dit :                                               Leurs yeux se rencontrèrent
                                                                                              limpide, franc & doux

Je vous remercie, Monsieur. » & son regard était si tranqui,
qu’il le charma jusqu’au fond de l’âme.
                                                         le sieur
Ma femme ! Es-tu prête ? » cria Jacques Arnoux apparaissant
dans le capot de l’escalier. [ Les côtelettes étaient cuites & il avait
faim.]

 

Nicole Sibireff – Anne Perthuis-Lejeune