*423 Il
fallait douze mille francs, ou bien il ne reverrait
plus Mme Arnoux ; et, jusqu’à présent, un espoir
invincible lui était resté. Est-ce qu’elle ne faisait
pas comme la substance de son cœur, le fond même de sa
vie ? Il fut pendant quelques minutes à chanceler sur
le trottoir, se rongeant d’angoisses, heureux
néanmoins de n’être plus chez l’autre.
Où avoir de l’argent ? Frédéric savait par
lui-même combien il est difficile d’en obtenir tout de
suite, à n’importe quel prix. Une seule personne
pouvait l’aider, Mme Dambreuse. Elle gardait toujours
dans son secrétaire plusieurs billets de banque. Il
alla chez elle ; et, d’un ton hardi :
— As-tu douze mille francs à me prêter ?
— Pourquoi ?
C’était le secret d’un autre. Elle voulait le
connaître. Il ne céda pas. Tous deux s’obstinaient.
Enfin, elle déclara ne rien donner, avant de savoir
dans quel but. Frédéric devint très rouge. Un de ses
camarades avait commis un vol. La somme devait être
restituée aujourd’hui même.
— Tu l’appelles ? Son nom ? Voyons, son nom ?
— Dussardier !
Et il se jeta à ses genoux, en la suppliant de
n’en rien dire.
— Quelle idée as-tu de moi ? reprit Mme Dambreuse.
On croirait que tu es le coupable. Finis donc tes airs
tragiques ! Tiens, les voilà ! et grand bien lui
fasse !
Il courut chez Arnoux. Le marchand n’était pas
dans sa boutique. Mais il logeait toujours rue
Paradis, car il possédait deux domiciles.
Rue Paradis, le portier jura que M. Arnoux était
absent depuis la veille ; quant à Madame, il n’osait
rien dire ; et *424 Frédéric,
ayant monté l’escalier comme une flèche, colla son
oreille contre la serrure. Enfin, on ouvrit. Madame
était partie avec Monsieur. La bonne ignorait quand
ils reviendraient ; ses gages étaient payés ;
elle-même s’en allait.
Tout à coup un craquement de porte se fit
entendre.
— Mais il y a quelqu’un ?
— Oh ! non, monsieur ! C’est le vent.
Alors, il se retira. N’importe, une disparition si
prompte avait quelque chose d’inexplicable.
Regimbart, étant l’intime de Mignot, pouvait
peut-être l’éclairer ? Et Frédéric se fit conduire
chez lui, à Montmartre, rue de l’Empereur.
Sa maison était flanquée d’un jardinet, clos par
une grille que bouchaient des plaques de fer. Un
perron de trois marches relevait la façade blanche ;
et en passant sur le trottoir, on apercevait les deux
pièces du rez-de-chaussée, dont la première était un
salon avec des robes partout sur les meubles, et la
seconde l’atelier où se tenaient les ouvrières
de Mme Regimbart.
Toutes étaient convaincues que Monsieur avait de
grandes occupations, de grandes relations, que c’était
un homme complètement hors ligne. Quand il traversait
le couloir, avec son chapeau à bords retroussés, sa
longue figure sérieuse et sa redingote verte, elles en
interrompaient leur besogne. D’ailleurs, il ne
manquait pas de leur adresser toujours quelque mot
d’encouragement, une politesse sous forme de
sentence ; et, plus tard, dans leur ménage, elles se
trouvaient malheureuses, parce qu’elles l’avaient
gardé pour idéal.
Aucune cependant ne l’aimait comme Mme Regimbart,
petite personne intelligente, qui le faisait vivre
avec son métier.
Dès que M. Moreau eut dit son nom, elle vint
prestement le recevoir, sachant par les domestiques ce
qu’il était à Mme Dambreuse. Son mari « rentrait à
l’instant même » ; et Frédéric tout en la suivant,
admira la tenue du logis et la profusion de toile
cirée qu’il y avait. Puis il attendit quelques minutes
dans une manière de bureau, où le Citoyen se retirait
pour penser.
Son accueil fut moins rébarbatif que d’habitude.
Il conta l’histoire d’Arnoux. L’ex-fabricant de
faïences avait enguirlandé Mignot, un patriote,
possesseur de cent actions du Siècle, en lui
démontrant qu’il fallait, au point de vue
démocratique, changer la gérance et la *425
rédaction du journal ; et, sous prétexte de
faire triompher son avis dans la prochaine assemblée
des actionnaires, il lui avait demandé cinquante
actions, en disant qu’il les repasserait à des amis
sûrs, lesquels appuieraient son vote ; Mignot n’aurait
aucune responsabilité, ne se fâcherait avec personne ;
puis, le succès obtenu, il lui ferait avoir dans
l’administration une bonne place, de cinq à six mille
francs pour le moins. Les actions avaient été livrées.
Mais Arnoux, tout de suite, les avait vendues ; et,
avec l’argent, s’était associé à un marchand d’objets
religieux. Là-dessus, réclamations de Mignot,
lanternements d’Arnoux ; enfin, le patriote l’avait
menacé d’une plainte en escroquerie, s’il ne
restituait ses titres ou la somme équivalente :
cinquante mille francs.
Frédéric eut l’air désespéré.
— Ce n’est pas tout, dit le Citoyen. Mignot, qui
est un brave homme, s’est rabattu sur le quart.
Nouvelles promesses de l’autre, nouvelles farces
naturellement. Bref, avant-hier matin, Mignot l’a
sommé d’avoir à lui rendre, dans les vingt-quatre
heures, sans préjudice du reste, douze mille francs.
— Mais je les ai ! dit Frédéric.
Le Citoyen se retourna lentement :
— Blagueur !
— Pardon ! ils sont dans ma poche. Je les
apportais.
— Comme vous y allez, vous ! Nom d’un petit
bonhomme ! Du reste, il n’est plus temps ; la plainte
est déposée, et Arnoux parti.
— Seul ?
— Non ! avec sa femme. On les a rencontrés à la
gare du Havre.
Frédéric pâlit extraordinairement. Mme Regimbart
crut qu’il allait s’évanouir. Il se contint, et même
il eut la force d’adresser deux ou trois questions sur
l’aventure. Regimbart s’en attristait, tout cela en
somme nuisant à la Démocratie. Arnoux avait toujours
été sans conduite et sans ordre.
— Une vraie tête de linotte ! Il brûlait la
chandelle par les deux bouts ! Le cotillon l’a perdu !
Ce n’est pas lui que je plains, mais sa pauvre femme !
Car le Citoyen admirait les femmes vertueuses, et
faisait grand cas de Mme Arnoux.
— Elle a dû joliment souffrir !
Frédéric lui sut gré de cette sympathie ; et,
comme s’il en avait reçu un service, il serra sa main
avec effusion.
*426 — As-tu fait
toutes les courses nécessaires ? dit Rosanette en le
revoyant.
Il n’en avait pas eu le courage, répondit-il, et
avait marché au hasard, dans les rues, pour
s’étourdir.
À huit heures, ils passèrent dans la salle à
manger ; mais ils restèrent silencieux l’un devant
l’autre, poussaient par intervalles un long soupir et
renvoyaient leur assiette. Frédéric but de
l’eau-de-vie. Il se sentait tout délabré, écrasé,
anéanti, n’ayant plus conscience de rien que d’une
extrême fatigue.
Elle alla chercher le portrait. Le rouge, le
jaune, le vert et l’indigo s’y heurtaient par taches
violentes, en faisaient une chose hideuse, presque
dérisoire.
D’ailleurs, le petit mort était méconnaissable,
maintenant. Le ton violacé de ses lèvres augmentait la
blancheur de sa peau ; les narines étaient encore plus
minces, les yeux plus caves ; et sa tête reposait sur
un oreiller de taffetas bleu, entre des pétales de
camélias, des roses d’automne et des violettes ;
c’était une idée de la femme de chambre ; elles
l’avaient ainsi arrangé toutes les deux, dévotement.
La cheminée, couverte d’une housse en guipure,
supportait des flambeaux de vermeil espacés par des
bouquets de buis bénit ; aux coins, dans les deux
vases, des pastilles du sérail brûlaient ; tout cela
formait avec le berceau une manière de reposoir ; et
Frédéric se rappela sa veillée près de M. Dambreuse.
Tous les quarts d’heure, à peu près, Rosanette
ouvrait les rideaux pour contempler son enfant. Elle
l’apercevait, dans quelques mois d’ici, commençant à
marcher, puis au collège au milieu de la cour, jouant
aux barres ; puis à vingt ans, jeune homme ; et toutes
ces images, qu’elle se créait, lui faisaient comme
autant de fils qu’elle aurait perdus, l’excès de la
douleur multipliant sa maternité.
Frédéric, immobile dans l’autre fauteuil, pensait
à Mme Arnoux.
Elle était en chemin de fer, sans doute, le visage
au carreau d’un wagon, et regardant la campagne
s’enfuir derrière elle du côté de Paris, ou bien sur
le pont d’un bateau à vapeur, comme la première fois
qu’il l’avait rencontrée ; mais celui-là s’en allait
indéfiniment vers des pays d’où elle ne sortirait
plus. Puis il la voyait dans une chambre d’auberge,
avec des malles par terre, un papier de tenture en
lambeaux, la porte qui tremblait au vent. Et après ?
que deviendrait-elle ? Institutrice, dame de
compagnie, femme de chambre, peut-être ? *427
Elle était livrée à tous les hasards de la
misère. Cette ignorance de son sort le torturait. Il
aurait dû s’opposer à sa fuite ou partir derrière
elle. N’était-il pas son véritable époux ? Et, en
songeant qu’il ne la retrouverait jamais, que c’était
bien fini, qu’elle était irrévocablement perdue, il
sentait comme un déchirement de tout son être ; ses
larmes accumulées depuis le matin débordèrent.
Rosanette s’en aperçut.
— Ah ! tu pleures comme moi ! Tu as du chagrin ?
— Oui ! oui ! j’en ai !…
Il la serra contre son cœur, et tous deux
sanglotaient en se tenant embrassés.
Mme Dambreuse aussi pleurait, couchée sur son lit,
à plat ventre, la tête dans ses mains.
Olympe Regimbart, étant venue le soir lui essayer
sa première robe de couleur, avait conté la visite de
Frédéric, et même qu’il tenait tout prêts douze mille
francs destinés à M. Arnoux.
Ainsi cet argent, son argent à elle, était pour
empêcher le départ de l’autre, pour se conserver une
maîtresse !
Elle eut d’abord un accès de rage ; et elle avait
résolu de le chasser comme un laquais. Des larmes
abondantes la calmèrent. Il valait mieux tout
renfermer, ne rien dire.
Frédéric, le lendemain, rapporta les douze mille
francs.
Elle le pria de les garder, en cas de besoin, pour
son ami, et elle l’interrogea beaucoup sur ce
monsieur. Qui donc l’avait poussé à un tel abus de
confiance ? Une femme, sans doute ! Les femmes vous
entraînent à tous les crimes.
Ce ton de persiflage décontenança Frédéric. Il
éprouvait un grand remords de sa calomnie. Ce qui le
rassurait, c’est que Mme Dambreuse ne pouvait
connaître la vérité.
Elle y mit de l’entêtement, cependant ; car, le
surlendemain, elle s’informa encore de son petit
camarade, puis d’un autre, de Deslauriers.
— Est-ce un homme sûr et intelligent ?
Frédéric le vanta.
— Priez-le de passer à la maison un de ces
matins ; je désirerais le consulter pour une affaire.
Elle avait trouvé un rouleau de paperasses
contenant des billets d’Arnoux parfaitement protestés,
et sur lesquels Mme Arnoux avait mis sa signature.
C’était pour ceux-là que Frédéric était venu une fois
chez M. Dambreuse pendant son déjeuner ; et, bien que
le capitaliste *428 n’eût
pas voulu en poursuivre le recouvrement, il avait fait
prononcer par le Tribunal de commerce, non seulement
la condamnation d’Arnoux, mais celle de sa femme, qui
l’ignorait, son mari n’ayant pas jugé convenable de
l’en avertir.
C’était une arme, cela ! Mme Dambreuse n’en
doutait pas. Mais son notaire lui conseillerait
peut-être l’abstention ; elle eût préféré quelqu’un
d’obscur ; et elle s’était rappelé ce grand diable, à
mine impudente, qui lui avait offert ses services.
Frédéric fit naïvement sa commission.
L’avocat fut enchanté d’être mis en rapport avec
une si grande dame.
Il accourut.
Elle le prévint que la succession appartenait à sa
nièce, motif de plus pour liquider ces créances
qu’elle rembourserait, tenant à accabler les époux
Martinon des meilleurs procédés.
Deslauriers comprit qu’il y avait là-dessous
un mystère ; il rêvait en considérant les billets. Le
nom de Mme Arnoux, tracé par elle-même, lui remit
devant les yeux toute sa personne et l’outrage qu’il
en avait reçu. Puisque la vengeance s’offrait,
pourquoi ne pas la saisir ?
Il conseilla donc à Mme Dambreuse de faire vendre
aux enchères les créances désespérées qui dépendaient
de la succession. Un homme de paille les rachèterait
en sous-main et exercerait les poursuites. Il se
chargeait de fournir cet homme-là.
Vers la fin du mois de novembre, Frédéric, en
passant dans la rue de Mme Arnoux, leva les yeux vers
ses fenêtres, et aperçut contre la porte une affiche,
où il y avait en grosses lettres :
« Vente d’un riche mobilier, consistant en
batterie de cuisine, linge de corps et de table,
chemises, dentelles, jupons, pantalons, cachemires
français et de l’Inde, piano d’Érard, deux bahuts de
chêne Renaissance, miroirs de Venise, poteries de
Chine et du Japon. »
« C’est leur mobilier ! » se dit Frédéric ; et le
portier confirma ses soupçons.
Quant à la personne qui faisait vendre, il
l’ignorait. Mais le
commissaire-priseur, Me Berthelmot, donnerait
peut-être des éclaircissements.
L’officier ministériel ne voulut point, tout
d’abord, dire quel créancier poursuivait la vente.
Frédéric insista. C’était un sieur Sénécal, agent
d’affaires ; et *429 Me Berthelmot
poussa même la complaisance jusqu’à prêter son journal
des Petites-Affiches.
Frédéric, en arrivant chez Rosanette, le jeta sur
la table tout ouvert.
— Lis donc !
— Eh bien, quoi ? dit-elle, avec une figure
tellement placide qu’il en fut révolté.
— Ah ! garde ton innocence !
— Je ne comprends pas.
— C’est toi qui fais vendre Mme Arnoux ?
Elle relut l’annonce.
— Où est son nom ?
— Eh ! c’est son mobilier ! Tu le sais mieux que
moi !
— Qu’est-ce que ça me fait ? dit Rosanette en
haussant les épaules.
— Ce que ça te fait ? Mais tu te venges, voilà
tout ! C’est la suite de tes persécutions ! Est-ce que
tu ne l’as pas outragée jusqu’à venir chez elle ! Toi,
une fille de rien. La femme la plus sainte, la plus
charmante et la meilleure ! Pourquoi t’acharnes-tu à
la ruiner ?
— Tu te trompes, je t’assure !
— Allons donc ! Comme si tu n’avais pas mis
Sénécal en avant !
— Quelle bêtise !
Alors, une fureur l’emporta.
— Tu mens ! tu mens, misérable ! Tu es jalouse
d’elle ! Tu possèdes une condamnation contre son
mari ! Sénécal s’est déjà mêlé de tes affaires ! Il
déteste Arnoux, vos deux haines s’entendent. J’ai vu
sa joie quand tu as gagné ton procès pour le kaolin.
Le nieras-tu, celui-là ?
— Je te donne ma parole…
— Oh ! je la connais, ta parole !
Et Frédéric lui rappela ses amants par leurs noms,
avec des détails circonstanciés. Rosanette, toute
pâlissante, se reculait.
— Cela t’étonne ! Tu me croyais aveugle parce que
je fermais les yeux. J’en ai assez, aujourd’hui ! On
ne meurt pas pour les trahisons d’une femme de ton
espèce. Quand elles deviennent trop monstrueuses, on
s’en écarte ; ce serait se dégrader que de les punir !
Elle se tordait les bras.
— Mon Dieu, qu’est-ce donc qui l’a changé ?
— Pas d’autres que toi-même !
— Et tout cela, pour Mme Arnoux !… s’écria
Rosanette en pleurant.
*430 Il reprit
froidement :
— Je n’ai jamais aimé qu’elle !
À cette insulte, ses larmes s’arrêtèrent.
— Ça prouve ton bon goût ! Une personne d’un âge
mûr, le teint couleur de réglisse, la taille épaisse,
des yeux grands comme des soupiraux de cave, et vides
comme eux ! Puisque ça te plaît, va la rejoindre
— C’est ce que j’attendais ! Merci !
Rosanette demeura immobile, stupéfiée par ces
façons extraordinaires. Elle laissa même la porte se
refermer ; puis, d’un bond, elle le rattrapa dans
l’antichambre, et, l’entourant de ses bras :
— Mais tu es fou ! tu es fou ! c’est absurde ! je
t’aime !
Elle le suppliait :
— Mon Dieu, au nom de notre petit enfant !
— Avoue que c’est toi qui as fait le coup ! dit
Frédéric.
Elle protesta encore de son innocence.
— Tu ne veux pas avouer ?
— Non !
— Eh bien, adieu ! et pour toujours !
— Écoute-moi !
Frédéric se retourna.
— Si tu me connaissais mieux, tu saurais que ma
décision est irrévocable !
— Oh ! oh ! tu me reviendras !
— Jamais de la vie !
Et il fit claquer la porte violemment.
Rosanette écrivit à Deslauriers qu’elle avait
besoin de lui tout de suite.
Il arriva cinq jours après, un soir ; et, quand
elle eut conté sa rupture :
— Ce n’est que ça ? Beau malheur !
Elle avait cru d’abord qu’il pourrait lui ramener
Frédéric ; mais, à présent, tout était perdu. Elle
avait appris, par son portier, son prochain mariage
avec Mme Dambreuse.
Deslauriers lui fit de la morale, se montra même
singulièrement gai, farceur ; et, comme il était fort
tard, demanda la permission de passer la nuit sur un
fauteuil. Puis, le lendemain matin, il repartit pour
Nogent, en la prévenant qu’il ne savait pas quand ils
se reverraient ; d’ici à peu, il y aurait peut-être un
grand changement dans sa vie.
Deux heures après son retour, la ville était en
révolution. On disait que M. Frédéric allait épouser *431
Mme Dambreuse. Enfin, les trois demoiselles
Auger, n’y tenant plus, se transportèrent
chez Mme Moreau, qui confirma cette nouvelle avec
orgueil. Le père Roque en fut malade. Louise
s’enferma. Le bruit courut même qu’elle était folle.
Cependant, Frédéric ne pouvait cacher sa
tristesse. Mme Dambreuse, pour l’en distraire
sans doute, redoublait d’attentions. Toutes les
après-midi, elle le promenait dans sa voiture ; et,
une fois qu’ils passaient sur la place de la Bourse,
elle eut l’idée d’entrer dans l’hôtel des
commissaires-priseurs, par amusement.
C’était le 1er décembre, jour même où devait se
faire la vente de Mme Arnoux. Il se rappela la date,
et manifesta sa répugnance, en déclarant ce lieu
intolérable, à cause de la foule et du bruit. Elle
désirait y jeter un coup d’œil seulement. Le coupé
s’arrêta. Il fallait bien la suivre. [...]
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