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Gustave Flaubert — L'Éducation sentimentale [1869]
Première rencontre avec Jacques Arnoux
Première partie, chapitre 1 —
folio
34r
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4. |
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Avec des termes obscènes & des comparaisons prises à l’argot des ateliers
— Vous êtes peintre ? » demanda timidement Frédéric.
Dieu merci
— Ma foi non » répondit-il
et
Alors il héla le cantinier pr avoir du rhum, du sucre & de
Puis ayant lui-même
l’eau. & quand il eut composé le mélange dans les deux verres &
— Buvez donc ! il faut toujours boire qque chose en fumant » puis il
essuya sa barbe à un foulard qui sentait le musc.
Il était assis sur le bordage, les deux jambes ballantes, en
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feutre
de paille posé
obliquement penché sur
son front |
de ses
feutre penché [illis.] niveau des sourcils
plein soleil. Son chapeau de paille incliné au bord de son front
bas
laissant voir ses yeux, comme dans les découpures d’un masque
& il avait l’air si bon enfant que Frédéric éprouvait à chaque
l'intérieur
minute, plus de sympathie pr sa personne. Il connaissait les
& de l’époque
des théâtres, des restaurants, des journaux, les gds artistes contemporains
qu’ familièrement
qu’il les appelait par leur prénom tout simplement.
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Cependant il confondait, un peu trop, dans la même
populaciers patriciens
estime les talens populaires & les génies raffinés. Du reste il
acceptait, sans répugnance, les opinions qu’on lui offrait. il
permit au jeune homme de faire valoir son esprit & il ne
Le jeune homme ne immédiatement
put se retenir de lui confier ses projets ; immédiatement*
il tout à coup
l’autre les encouragea. Mais il s’interrompit pr considérer
attentivement le tuyau de la cheminée. Puis ayant tiré
très vite
sa montre il marmotta un long calcul afin de savoir
combien chaque coup de piston se répétant quarante
à tant de
trois fois par minute devait coûter dans [illis.] en
prélevant d’abord comme frais etc. etc & la somme
contempla
enfin trouvée, il regarda le paysage. Il se disait heureux
d’être échappé aux affaires & parlait de la campagne
avec exaltation. |
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Nicole SIBIREFF |
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