Gustave Flaubert — L'Éducation sentimentale [1869]

Jours heureux à Auteuil

Deuxième partie — Chapitre 6 — Transcription du folio 128r

 

318.

  époque tout à la fois de réflexion & de tendresse, où la maturité qui commence
colore le regard d’une flamme plus profonde
quand la force du cœur se mêle à l’expérience de la vie, & que
sur la fin de ses épanouissements, l’être complet déborde de
richesses dans l’harmonie naturelle de sa beauté. Jamais elle n’avait
eu plus de douceur, d’indulgence, & il s’y joignait l’aplomb
d’une conscience tranquille
. Sûre de ne pas faillir, elle s’aban-
-donnait à un sentiment qui lui semblait un droit conquis
par ses chagrins, [une sorte de récompense méritée] cela était
si bon, du reste, & si nouveau. Quel abîme entre la grossièreté
d’Arnoux & les adorations de Frédéric.
                                             [illis.]
Il tremblait de perdre par un mot tout ce qu’il croyait
avoir fait gagné, se disant qu’on peut ressaisir une
occasion & qu’on ne rattrape jamais une sottise. Dans un
                                                                                       enfin*
raffinement de timidité de délicatesse et de lâcheté
il voulait
qu’elle se donnât & non la prendre. L’assurance de
son amour le délectait, comme un avant-goût de la possession
– & puis, le charme de sa personne lui troublait le cœur plus
que les sens, à en avoir qqfois quand il la regardait


    songeant
ne pensant mê
me pas
qu’il en oubliait jusqu’à
à la possibilité
la chance d’être plus heureux
d’un bonheur
absolu
comme des [illis.]                           .......[illis.] .....
des envies de pleurer. C’était une béatitude infinie
    tel ennivrement                                         indéfinie
une ivresse tellement puissante qu’il ne s’en apercevait
       ennivrement
     Mais
pas
. Puis, loin d’elle, des convoitises furieuses le
       [illis.]                                                       de
dévoraient.
 

Philippe LAVERGNE