Le résumé (ou contraction) de texte suppose une bonne connaissance des caractères du discours argumentatif, dont vous trouverez les notions indispensables sur les pages du site consacrées aux épreuves du Baccalauréat ou du BTS :

 
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  Dans le cadre des programmes des années précédentes, vous trouverez des éléments méthodologiques et des exemples de résumés :

 

EXEMPLE I

 

TEXTE OBSERVATIONS

  La démocratie, au sens étymologique du mot, désigne le gouvernement par le peuple. Une réflexion sur ses nouvelles formes passe naturellement par l’examen de la place des citoyens dans l’organisation et la direction des affaires publiques. Elle passe également par l’étude de la persistance de l’oligarchie et de l’autocratie dans nos sociétés, puisque l’idéal démocratique est né du rejet de la loi du plus fort et de la hiérarchie sociale au profit des principes d’égalité et de liberté.
  Mesurer la participation citoyenne implique donc de jeter d'abord un regard attentif sur divers aspects de la vie politique comme le taux de participation aux processus électoraux, le niveau de l’engagement social et de l’action militante, l’efficacité des différentes méthodes de participation publique, la compétence civique ainsi que le niveau de l’éthique sociale des citoyens. On doit également considérer l’influence qu’exercent les principaux acteurs de la scène publique que sont les politiciens et les médias puis se demander si l’espace décisionnel accordé aux citoyens est suffisant ou s’il n’y a pas lieu de l’élargir et de l’augmenter de façon significative. Enfin, il importe de jeter un regard attentif aux nouvelles formes de participation citoyenne élaborées et expérimentées depuis un certain nombre d’années déjà.
  Il n’est pas sans intérêt de rappeler au préalable qu’être citoyen signifie justement posséder le droit, sinon le privilège de participer librement à la vie de la communauté politique à laquelle on appartient. Cette participation se fait par la discussion avec les autres membres de la collectivité pour déterminer les paramètres du bien commun parce que le dialogue fondé sur la tolérance, le respect et l’empathie permet de concilier davantage les intérêts individuels et l’intérêt général dans l’esprit d’une coexistence harmonieuse et pacifique. Incidemment, plusieurs études contemporaines ont démontré que la participation des citoyens dans l’élaboration des solutions aux problèmes de leur communauté comporte d’énormes avantages. Cela permet d'abord d’éveiller les consciences et de développer la compétence civique en faisant reculer les frontières de l’ignorance. Cela favorise également l’esprit communautaire lequel exige confiance, coopération et compromis entre les individus. Cela améliore enfin la prise de décision, la rendant plus juste, plus rationnelle, plus adéquate, plus acceptable et mieux acceptée. À cet égard, il est intéressant de noter que les plus récentes recherches en politiques publiques sur l’architecture sociale révèlent que, appelés à définir le bien-être au vingt et unième siècle, les citoyens eux-mêmes soulignent l’importance de développer des occasions significatives d’engagement et de participation civiques.
  En effet, si la démocratie est une forme très ancienne de gouvernement, la réalité montre qu’elle est en même temps très jeune et même, à bien des égards, relativement embryonnaire. Dans l’histoire moderne, elle a, presque partout, à peine un siècle. Auparavant, la majorité des citoyens, principalement les femmes, n’avaient même pas droit de vote. Et on considérait en général qu’une fois leur bulletin dans l’urne, les gens n’avaient plus rien à dire. Le Parlement, institution fondatrice de la démocratie moderne, était lui-même un pouvoir oligarchique détenant le monopole de l’expression démocratique et refusant d’inviter les citoyens à l’accompagner dans l’exercice de ses responsabilités. Cette façon de voir a été remise en question dans la foulée de la démocratisation de l’instruction, de l’accès au savoir et de l’entrée en scène des médias de masse. Il a fallu l’émergence d’une véritable opinion publique pour que les représentants du peuple et les dirigeants « élus » lèvent progressivement les restrictions au droit de vote et à la création d’associations citoyennes, puis qu’ils comprennent qu’il leur était désormais indispensable non seulement de prendre le pouls de la population, mais également de négocier leurs interventions avec elle, sinon de partager le pouvoir avec elle. De la « démocratie sans le peuple », on a cherché à passer à la « démocratie avec le peuple » pour donner naissance à la participation publique, processus par lequel ceux qui ont la mission de décider et d’édicter les règles sociales invitent les citoyens concernés à s’exprimer et à commenter les choix envisagés.
  Après quelques décennies d’usage, la question est aujourd’hui de savoir ce qu’a donné et donne toujours cette participation citoyenne. Pour tous ceux qui s’y sont intéressés, la participation publique présente un bulletin équivoque. Dans la colonne positive, on ne peut pas nier que plusieurs décisions gouvernementales et parlementaires ont pu être modifiées et même abandonnées en faveur du point de vue citoyen. Les autorités ont été éveillées à de nouvelles réalités et de nombreux citoyens ont pu à maintes reprises exprimer craintes et oppositions autant qu’avis et accords. Au fil du temps, plusieurs ont pu établir un contact régulier et un dialogue fructueux avec la classe politique au point où certains citoyens se sont vu confier des responsabilités de gestionnaires locaux de différents services défrayés par les fonds publics. D’autres, les dirigeants des grandes organisations socioéconomiques, ont même été invités à assumer des responsabilités politiques réelles dans le contexte de l’entrée en scène de la démocratie sociale, produit des exercices de concertation des grands acteurs sociaux.
  Ce bilan positif comporte cependant un revers. Les méthodes d’expression citoyenne utilisées un peu partout, particulièrement les audiences publiques, les comités consultatifs, les groupes échantillons et les sondages d’opinion, se sont très souvent révélées de mauvais canaux de communication entre les citoyens et leurs gouvernements. L’un des principaux reproches formulés à l’endroit de ces méthodes est qu’elles ne permettent généralement qu’un flot d’information à sens unique, sans véritable interaction significative ni influence déterminante. Elles sont aussi presque toujours l’apanage des porte-parole des groupes d’intérêt et des corps intermédiaires ou des individus ayant un statut socioéconomique élevé. La majorité des citoyens n’y sont pas directement associés. Elles sont enfin davantage conçues pour approuver sinon avaliser des décisions déjà prises, pour tester l’opinion publique, pour vendre des projets à la population si ce n’est pour la contrôler jusqu’à la manipuler, plutôt que pour favoriser une large participation citoyenne au processus décisionnel. En somme, ces méthodes de participation publique comportent dans leur nature même des vices de forme qui les rendent passablement contestables du point de vue démocratique. Si, en général, elles permettent aux citoyens d’exprimer leurs intérêts, leurs besoins, leur sentiment face aux enjeux publics, elles ne permettent pas cependant d’explorer à fond toutes les avenues, tous les points de vue, de peser le pour et le contre, de développer une véritable conscience collective ainsi qu’une vision éclairée, stable et rationnelle, nécessaire pour former un solide jugement public et prendre une décision responsable tant sur le plan moral qu’émotionnel. En définitive, les dirigeants politiques utilisent davantage la participation publique pour sa valeur symbolique sur le plan démocratique que pour sa contribution effective aux processus décisionnels.
  On comprend donc mieux pourquoi la participation publique suscite aujourd’hui tant de frustration, de cynisme et de désintérêt parmi la population. Pourtant, paradoxalement, les citoyens sont de plus en plus nombreux à vouloir participer de façon plus renseignée, plus intense et plus efficace aux orientations et aux activités de la sphère publique. Rejetant la nature cosmétique des pratiques de participation, de plus en plus de gens réclament qu’on leur permette d’exercer une influence significative, sinon un contrôle réel sur les décisions qui concernent leurs conditions de vie et leur environnement au sens le plus large du terme. Cela explique pourquoi, un peu partout, plusieurs cherchent et expérimentent de nouvelles méthodes permettant l’instauration d’une véritable démocratie participative.
Jean-Pierre Charbonneau
«De la démocratie sans le peuple à la démocratie avec le peuple.»
Ethique publique, 2005.

Première étape
l'énonciation :


Une première, voire une seconde, lecture doit vous amener à identifier les caractères essentiels du texte, que votre résumé devra reproduire :

- situation d'énonciation (de type expressif ici);
- niveau de langue (soutenu);
- vocabulaire : le texte ne présente pas de sérieuses difficultés sur ce plan.
Attention néanmoins aux mots embryonnaire, incidemment, oligarchique, frustration, cynisme, cosmétique
.

Deuxième étape
thème, thèse :


- Efforcez-vous de formuler pour vous-même le sujet du texte (au besoin, donnez-lui un titre.
Ici, le texte pourrait s'intituler : D'une démocratie introuvable).
- Plus important encore : repérez la (ou les) thèse(s) et prenez soin de la (les) rédiger rapidement.
Dans ce texte, l'auteur, estime que malgré quelques progrès la participation citoyenne est insuffisante.

Troisième étape
l'organisation :


La lecture du texte vous fait percevoir par les paragraphes différentes unités de sens. Cependant les paragraphes constituent des indices insuffisants de l'organisation. Vous savez que tout raisonnement discursif s'accompagne de connexions logiques (nous les soulignons en rouge : en gras pour les connexions essentielles) qui vous feront percevoir l'enchaînement des arguments.


  Comme toujours dans une argumentation, les arguments s'accompagnent d'exemples : leur caractère concret et circonstancié vous permet de les repérer d'emblée (nous les soulignons en bleu).

  C'est cette organisation que nous vous invitons à représenter précisément dans un tableau de structure : ne pensez pas que le fait d'établir ce tableau au brouillon vous fera perdre du temps. Une fois rempli, il vous permettra au contraire d'aller plus vite dans la reformulation, chaque unité de sens étant nettement repérée :


- la colonne Parties sépare chaque étape de l'argumentation, que la colonne Sous-Parties décompose si nécessaire.
- la colonne Arguments vous permet d'identifier rapidement chaque argument et d'aller déjà vers son expression la plus concise en repérant les mots-clefs. C'est cette colonne, surtout, qui vous sera précieuse.
- quant à la colonne Exemples, elle vous permet de repérer ce que votre résumé pourra ensuite ignorer (attention cependant au fait qu'un long paragraphe d'exemples peut avoir une valeur argumentative !).

 

I - TABLEAU DE STRUCTURE

 

 Le résumé ne peut être réalisé sans une analyse précise de la structure du texte. Il devra en effet rendre compte de manière concise des relations qui lient les différents arguments et de leur rapport respectif afin de donner une image exacte de l'économie générale du texte. Il convient pour cela de repérer les articulations logiques (connecteurs, paragraphes, lexique) et de dresser un tableau qui permettra de mieux distinguer ce qui est essentiel de ce qui est accessoire.

 

PARTIES SOUS-PARTIES ARGUMENTS
(mots-clefs)

EXEMPLES

La démocratie... d'égalité et de liberté.
     (1er §)  Introduction.
/
Il convient d'examiner la place réelle des citoyens dans la démocratie moderne. /
Mesurer... implique donc ... nombre d'années déjà.
    (2ème §)   Conséquence.
... jeter d'abord un regard attentif... des citoyens. Il faut considérer les formes de la participation citoyenne.

/

On doit également... significative. Il faut étudier l'influence des politiques et des médias. /
Enfin il importe... nombre d'années déjà. Il faut faire attention aux nouvelles formes de participation.  
Il n'est pas... au préalable participation civiques.
    (3 §).
  Exposé préliminaire.

Il n'est pas sans intérêt... d"énormes avantages.

La participation des citoyens à leur communauté a d'énormes avantages.
/
Cela permet d'abord d'éveiller les consciences... ▶ l'ignorance.
Cela favorise également... ▶ les individus.
Cela améliore enfin... ▶ participation civiques.

Cela éveille les consciences;
favorise l'esprit communautaire;
améliore la prise de décision.

/

En effet à parvenir...les choix envisagés
   (4e §) Cause.

/
L'émergence d'une véritable opinion publique impose une démocratie avec le peuple.
droit de vote des femmes - caractère oligarchique du Parlement.
Après quelques décennies... aujourd'hui ▶ processus décisionnels.
  (5ème et 6ème §)
  Opposition.
Après quelques... bulletin équivoque. Le bilan de cette participation est équivoque. /
Dans la colonne positive... acteurs sociaux. De nombreuses décisions gouvernementales ont été amendées par l'action citoyenne. responsabilité de gestionnaires locaux.
Ce bilan positif... cependant processus décisionnels. Les méthodes de participation publique restent insuffisantes et réservées à certains. /
On comprend donc ▶ participative.
  (7ème §)  Conclusion

/

Les citoyens sont en quête de nouvelles méthodes.
/

 

II - REFORMULATION

 

RÉSUMEZ CE TEXTE EN 140 mots ±10%.

Les contraintes de l'exercice :

  • une reformulation fidèle au système énonciatif (le jeu des pronoms, les registres) et à l'organisation du texte (vous en conserverez les connecteurs logiques essentiels).
  • une réduction en un nombre défini de mots assortie d'une marge de + ou - 10% (rappelons qu'on appelle mot toute unité typographique signifiante séparée d'une autre par un espace ou un tiret : ainsi c'est-à-dire = 4 mots, mais aujourd'hui = 1 mot puisque les deux unités typographiques n'ont pas de sens à elles seules). Vous aurez soin d'indiquer le nombre de mots que compte votre résumé et d'en faciliter la vérification en précisant nettement tous les cinquante mots le nombre obtenu.
  • une recherche systématique de l'équivalence par des synonymes.
  • une langue correcte, sur le plan de l'orthographe comme de la syntaxe, qui évite le simple collage des phrases-clés du texte.

 

Comment procéder ?

que faut-il garder ?

     la situation d'énonciation,
     le système énonciatif,
     la progression argumentative, les mots de liaison (ou leurs équivalents).

que faut-il supprimer ?

     les exemples (s'ils ne sont pas trop développés ou s'il ne s'agit pas d'exemples argumentatifs).
     les redites : en dégageant la progression des arguments, vous repérerez mieux ceux qui, dans chaque partie, se répètent sous une autre forme.

comment faire ?

     englober : les exemples importants, les images peuvent parfois se développer sur plusieurs lignes. Les supprimer sans discernement serait dangereux. Mieux vaut les réduire à une formulation plus dense.
     nominaliser : une phrase complexe est toujours susceptible d'être trop longue et lourde. Choisissez dès que possible la phrase simple, l'adjectif au lieu de la relative, le nom au lieu du verbe.
     choisir des synonymes pertinents : c'est l'une des difficultés du résumé. Votre niveau de vocabulaire fera toujours la différence. Mais il ne faut pas non plus pousser trop loin cette recherche de synonymes : relever un champ lexical dominant peut donner quelques indications et souffler quelques autres mots simples.

  Proposons-nous de résumer ce texte de 1200 mots environ en 140 mots (±10%).
 Nous allons décomposer la démarche en traitant successivement chaque unité de sens dégagée par le tableau de structure. Chacune d'elles nous offrira en outre de quoi appliquer les règles essentielles de la concision. Vous observerez comment, pour reformuler chaque unité de sens, le résumé s'efforce de se limiter à une seule phrase.

 

PARTIES

Observations sur les réductions

PROPOSITION DE RÉSUMÉ

1° §

/
Il importe d'enquêter sur la place effective des citoyens dans nos sociétés démocratiques et sur la persistance des pouvoirs qui les gouvernent.
2° §
La succession des trois sous-parties peut aboutir à une seule phrase.
Il faut ainsi considérer les formes de la participation citoyenne, étudier l'influence des politiques et des médias, faire attention enfin aux nouvelles formes de participation.

3° §

/
Rappelons d'abord quelle est l'importance de cete participation en démocratie. Elle éveille les consciences, favorise l'esprit communautaire, améliore la prise de décision.
4° §
L'adjectif jeune suffit à rendre compte du passage à l'actualité.
En effet notre jeune démocratie a consacré le rôle de l'opinion et de l'assentiment populaire.
5° & 6° §
L'opposition de ces paragraphes est rendue par un simple balancement dans la phrase.
Le bilan est mitigé : d'un côté plusieurs décisions gouvernementales ont été amendées par l'action citoyenne, mais d'un autre cette action reste limitée et sert trop souvent d'alibi aux pouvoirs en place.
7° §
/
Les citoyens sont donc à la recherche de formes nouvelles de démocratie participative.

 

Présentation du résumé

  Il importe d'enquêter sur la place effective des citoyens dans nos sociétés démocratiques et sur la persistance des pouvoirs qui les gouvernent. Il faut donc considérer les formes de la participation citoyenne, étudier l'influence des politiques et des médias, faire attention enfin aux nouvelles formes de participation. Rappelons [50] d'abord quelle est l'importance de cette participation en démocratie. Elle éveille les consciences, favorise l'esprit communautaire et améliore la prise de décision. En effet notre jeune démocratie a consacré le rôle de l'opinion et de l'assentiment populaire. Le bilan est mitigé : d'un côté plusieurs [100] décisions gouvernementales ont été amendées par l'action citoyenne, mais, d'un autre, cette action reste limitée et sert trop souvent d'alibi aux pouvoirs en place. Les citoyens sont donc à la recherche de formes nouvelles de démocratie participative.
[140 mots]

 

EXEMPLE II

 

▶ proposé par Noura Guerbelmous
professeur en Classes Préparatoires scientifiques (MP)
à l'École Royale Navale de Casablanca.

 Vous résumerez le texte suivant en 150 mots avec une marge de tolérance de 10%. Vous indiquerez obligatoirement le nombre total de mots utilisés en bas de votre copie et vous aurez soin d’en faciliter la vérification en mettant une barre oblique tous les 50 mots.
 Des points de pénalité seront soustraits en cas de non-respect du nombre total de mots ±10% utilisés.

 La grande fin que se proposent ceux qui entrent dans une société, étant de jouir de leurs propriétés, en sûreté et en repos; et le meilleur moyen qu'on puisse employer, par rapport à cette fin, étant d'établir des lois dans cette société, la première et fondamentale loi positive de tous les États, c'est celle qui établit le pouvoir législatif, lequel, aussi bien que les lois fondamentales de la nature, doit tendre à conserver la société; et, autant que le bien public le peut permettre, chaque membre et chaque personne qui la compose. Ce pouvoir législatif n'est pas seulement le suprême pouvoir de l'État, mais encore est sacré, et ne peut être ravi à ceux à qui il a été une fois remis. Il n'y a point d'édit, de qui que ce soit, et de quelque manière qu'il soit conçu, ou par quelque pouvoir qu'il soit appuyé, qui soit légitime et ait force de loi, s'il n'a été fait et donné par cette autorité législative, que la société a choisie et établie; sans cela, une loi ne saurait avoir ce qui est absolument nécessaire à une loi; à savoir, le consentement de la société, à laquelle nul n'est en droit de proposer des lois à observer qu'en vertu du consentement de cette société, et en conséquence du pouvoir qu'il a reçu d'elle. C'est pourquoi toute la plus grande obligation où l'on puisse être de témoigner de l'obéissance, n'est fondée que sur ce pouvoir suprême qui a été remis à certaines personnes, et sur ces lois qui ont été faites par ce pouvoir. De même, aucun serment prêté à un pouvoir étranger, quel qu'il soit, ni aucun pouvoir domestique ou subordonné, ne peuvent décharger aucun membre de l’État de l'obéissance qui est due au pouvoir législatif, qui agit conformément à l'autorité qui lui a été donnée, ni l'obliger à faire aucune démarche contraire à ce que les lois prescrivent, étant ridicule de s'imaginer que quelqu'un pût être obligé, en dernier ressort, d'obéir au pouvoir d'une société, lequel ne serait pas suprême.
 Quoique le pouvoir législatif (soit qu'on l'ait remis à une seule personne ou à plusieurs, pour toujours, ou seulement pour un temps et par intervalles) soit le suprême pouvoir d'un État; cependant, il n'est […], et ne peut être absolument arbitraire sur la vie et les biens du peuple. Car, ce pouvoir n'étant autre chose que le pouvoir de chaque membre de la société, remis à cette personne ou à cette assemblée, qui est le législateur, ne saurait être plus grand que celui que toutes ces différentes personnes avaient dans l'état de nature, avant qu'ils entrassent en société, et eussent remis leur pouvoir à la communauté qu'ils formèrent ensuite. Car, enfin, personne ne peut conférer à un autre plus de pouvoir qu'il n'en a lui-même : or, personne n'a un pouvoir absolu et arbitraire sur soi-même, ou sur un autre, pour s'ôter la vie, ou pour la ravir à qui que ce soit, ou lui ravir aucun bien qu'il lui appartienne en propre. Un homme, ainsi qu'il a été prouvé, ne peut se soumettre au pouvoir arbitraire d'un autre; et, dans l'état de nature, n'ayant point un pouvoir arbitraire sur la vie, sur la liberté, ou sur les possessions d'autrui, mais son pouvoir s'étendant seulement jusqu'où les lois de la nature le lui permettent, pour la conservation de sa personne, et pour la conservation du reste du genre humain; c'est tout ce qu'il donne et qu'il peut donner à une société, et, par ce moyen, au pouvoir législatif; en sorte que le pouvoir législatif ne saurait s'étendre plus loin. Selon sa véritable nature et ses véritables engagements, il doit se terminer au bien public de la société. C'est un pouvoir qui n'a pour fin que la conservation, et qui, par conséquent, ne saurait jamais avoir droit de détruire, de rendre esclave, ou d'appauvrir, à dessein, aucun sujet. Les obligations des lois de la nature ne cessent point dans la société ; elles y deviennent même plus fortes en plusieurs cas; et les peines qui y sont annexées pour contraindre les hommes à les observer, sont encore mieux connues par le moyen des lois humaines. Ainsi, les lois de la nature subsistent toujours comme des règles éternelles pour tous les hommes, pour les législateurs, aussi bien que pour les autres. S'ils font des lois pour régler les actions des membres de l'État, elles doivent être aussi faites pour les leurs propres, et doivent être conformes à celles de la nature, c'est-à-dire, à la volonté de Dieu, dont elles sont la déclaration; et la loi fondamentale de la nature ayant pour objet la conservation du genre humain; il n'y a aucun décret humain qui puisse être bon et valable, lorsqu'il est contraire à cette loi.

John Locke, Deuxième Traité du gouvernement civil, 1690.

CORRIGÉ

I - Lecture globale

1- Thème du texte : la loi.

2- Termes-clés : loi; pouvoir législatif; société.

3- Connecteurs logiques :

* C'est pourquoi : à valeur consécutive (de conséquence).
* Quoique; cependant : à valeur concessive (de concession).
* Ainsi : à valeur de conséquence.

4- Thèse de l’auteur : Le pouvoir législatif s’avère indispensable à la vie communautaire.

II - Analyse du texte à résumer :

1- Unités de sens : l’on distingue quatre unités de sens au sein du texte en question.

a- Du début du texte jusqu’à « et en conséquence du pouvoir qu'il a reçu d'elle. »

b- De « C'est pourquoi » jusqu’à « lequel ne serait pas suprême ».

c- De « Quoique le pouvoir législatif » jusqu’à « le moyen des lois humaines.»

d- De « des règles éternelles pour tous les hommes » jusqu’à la fin du texte.

2- Arguments avancés par l’auteur :

Unité a :* La loi assure les droits du propriétaire, garantit la paix.
              * Le pouvoir législatif confère à la loi sa crédibilité.

Unité b :* Tout individu est interpellé à s’assujettir au pouvoir législatif étant donné qu’il est conçu comme étant suprême.

Unité c :* Le pouvoir législatif, quand bien même il serait supérieur aux autres lois, ne saurait, pour autant, être injuste vis-à-vis des humains.
              * Ledit pouvoir ne fait que servir, de ce fait, le bien commun.

Unité d :* Les lois sociales s’accordent, à cet égard, avec les lois naturelles et, par là, avec les décrets divins.

III - Présentation du résumé

  La loi se révèle sine qua non à la vie sociale. De fait, elle assure les droits du propriétaire aussi bien que la paix au sein d’une société. Par surcroît, c’est le pouvoir législatif qui confère à la loi sa légitimité et son autorité.
 Aussi, tout individu / est-il interpellé à s’assujettir audit pouvoir étant donné qu’il est conçu comme étant suprême. D’ailleurs, celui-ci émane du consentement de la communauté sociale.
 Le pouvoir législatif, quand bien même il serait supérieur à tous les pouvoirs, ne saurait, pour autant, être injuste vis-à-vis / des humains. Lequel pouvoir sert, de ce fait, le bien commun ainsi que l’intérêt public.
 Les lois sociales s’accordent, à cet égard, avec les lois naturelles et, par là, avec les décrets divins vu qu’ils visent tous à garantir l’instauration et la pérennité de la vie collective.
[150 mots]